L'INNÉDIT

Mauvaise Nouvelle

Raphaëlle Gingras, journaliste, groupe 41

8 novembre 2015

 

La gardienne eut à peine le temps de poser les pieds dans l’entrée que Pénéloppe se sauvait en courant.

 

Après tout, si Miranda l’appelait dans cet état, ça devait être urgent. Le ton qu’elle employait, cette voix qui signalait qu’elle venait de sangloter ne laissait rien présager de bon.

 

Pénéloppe ne pouvait passer une journée sans pleurer. Elle pleurait devant chaque coupure qu’elle se faisait, devant chaque film qu’elle regardait… Mais, le plus souvent, c’était les souvenirs de son divorce qui la hantaient ou son bébé Loïc qui lui tombait sur le système. Miranda, de son côté, était toujours positive, toujours heureuse… Alors, pourquoi était-ce elle qui pleurait maintenant?

 

Pénéloppe essaya de se remémorer la dernière fois qu’elle avait eu des nouvelles de son amie. C’était la semaine passée, le samedi, alors que Dave était absent pour la fin de semaine. Dave, l’arrogant, ce nigaud de garçon dont Miranda s'était amourachée. Un type colérique, méchant, insupportable. Le genre d’homme qui passait sa vie à crier et à se plaindre.

 

Et si c’était lui qui la faisait pleurer? Peut-être qu’en s’emportant pour la énième fois, il avait insulté sa belle et fait dégénérer une dispute? Juste penser à ce que ce stupide Dave aurait pu sortir de sa stupide bouche enrageait Pénéloppe. Après tout, pour que ça ait fait pleurer Miranda, ça devait être grave…

 

Pénéloppe se dirigeait de plus en plus vite vers la maison de son amie, cherchant à deviner ce “quelque chose de grave” que Miranda venait d’entendre. Quelque chose de grave… Et si c’était plus que des mots? Si Dave était allé jusque là… S’il avait OSÉ frapper Miranda?

 

Tout semblait soudain s’éclaircir pour Pénéloppe, comme si toutes ses blessures apparaissaient de nouveau sur son corps. Elle se revoyait quelques mois plus tôt, couverte de bleus, en larmes… Puis, s’imaginait toutes ces scènes de coups et de cris, vécues cette fois par Miranda et Dave.

 

“Non! Tout le monde sauf Miranda!” Elle ne méritait pas de vivre cela. La simple vision d’une Miranda battue remplissait encore une fois les yeux de Pénéloppe de larmes qui coulaient sur son visage malgré elle. Miranda… Une personne tellement bien… TROP bien pour ce Dave, ce salaud qui était peut-être en train de lui faire du mal.

 

Les battements de coeur de Pénéloppe s’accéléraient, tout comme ses pieds qui couraient à une vitesse hallucinante. Il était sûrement déjà trop tard pour sauver son amie qui était sûrement en train de se tordre de douleur…

 

Chaque marche de l’entrée ramenait un nouveau souvenir dans la tête de Pénéloppe. Un coup ici, un autre là… Une porte qui claque pour la dernière fois… Un bébé qui pleure sans cesse, comme sa mère, mais qui a le même visage que son père qu’il n’aura jamais pu connaître…

Des souvenirs qui furent tous interrompus par une Miranda en larmes qui ouvrait la porte… Avec la bague au doigt.